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Antibiogo certifié ISO 13485, une première pour un projet humanitaire

En 2025, l’application Antibiogo connaît un large déploiement, au-delà des terrains MSF. Après son adoption par tous les laboratoires MSF en 2024, l’outil a également été intégré par les autorités sanitaires locales dans plusieurs pays : Burkina Faso, Comores, Guinée Conakry, Liberia, Mali, République Centrafricaine, République Démocratique du Congo et Bénin. Cette expansion marque une nouvelle ère pour Antibiogo : le passage à l’échelle.

Parallèlement, les équipes du projet ont poursuivi leurs efforts pour viser le plus haut niveau d’exigence en matière de qualité, aboutissant à l’obtention de la certification ISO 13485. Ce niveau d’exigence inédit pour un projet d’ONG, témoigne de l’excellence des pratiques de gestion mises en place pour ce projet de dispositif médical, dont La Fondation MSF est le fabricant légal. 

Nous avons rencontré Julien Dupont, référent qualité et affaires réglementaires du projet Antibiogo, pour en savoir plus sur cette grande étape et ce que cela signifie pour la lutte contre l’antibiorésistance.

  • La Fondation MSF : Le projet Antibiogo vient d’obtenir la certification ISO 13485. Qu’est-ce que cela signifie concrètement ?

Julien Dupont : Obtenir l’ISO 13485, c’est la reconnaissance que le projet Antibiogo, en tant que projet de dispositif médical in vitro porté légalement par La Fondation MSF, a mis en place des pratiques et des processus qualité conformes aux plus hauts standards internationaux. Ces standards sont suivis par toute l’industrie des dispositifs médicaux, notamment en Europe et aux Etats-Unis. En clair, cette certification montre que nous n’avons fait aucun compromis sur le niveau d’exigence, afin de garantir la fiabilité de l'outil pour les utilisateurs et les patients, ce qui est crucial lorsqu’on parle de diagnostic et de prescription d’antibiotiques.

  • LFMSF : C’est une première pour une ONG, n’est-ce pas ?

J. D. : Exactement ! C’est inédit qu’un projet humanitaire obtienne ce niveau de certification pour un projet de dispositif médical gratuit, et destiné en priorité aux pays à ressources limitées. Nous avons choisi de viser l’ISO 13485 pour fixer le plus haut niveau d’exigence possible à notre projet, et garantir ce niveau de qualité à nos utilisateurs cibles. Après la recommandation de l’OMS en 2024, cette certification ISO 13485 marque une étape importante. Elle confirme qu’on peut concilier excellence réglementaire et accessibilité.

  • LFMSF : Concrètement, qu’est-ce que cette certification change pour Antibiogo et pour ses utilisateurs ?

J. D. : Rien et tout à la fois. L’application Antibiogo aide les techniciens de laboratoire, même non experts, à mesurer et interpréter correctement les antibiogrammes, et donc à fournir des résultats précis aux médecins pour prescrire les antibiotiques les plus efficaces. En pratique, la certification ne change pas cela. En revanche, c’est un signal de confiance pour les utilisateurs, pour les autorités sanitaires et les partenaires qui souhaitent adopter la solution. Cela prouve que l’outil repose sur des bases solides de gestion des risques et de performances et de suivi post commercialisation (support produit et amélioration continue), des éléments qui sont gages de sérieux et qui favorisent l’adoption de l’application à grande échelle.

  • LFMSF : Peux-tu nous rappeler pourquoi Antibiogo est si important dans la lutte contre la résistance aux antimicrobiens ?

J. D. : La résistance aux antimicrobiens (RAM) est une menace majeure pour la santé publique : elle a causé 1,27 million de décès en 2019 et pourrait atteindre 10 millions d’ici 2050 si rien n’est fait. Dans les pays à ressources limitées, où MSF intervient, l’accès à des laboratoires de bactériologie clinique est souvent restreint. Les patients arrivent avec des infections qui ne répondent pas aux antibiotiques classiques, et les équipes médicales manquent de ressources pour guider leurs prescriptions. C’est précisément pour combler ce manque et soutenir les pratiques de prescription rationnelle que l’application Antibiogo a été développée.

  • LFMSF : Quels sont les prochains objectifs pour Antibiogo ?

J. D. : D’un point de vue règlementaire et qualité, nous poursuivons l’amélioration continue et la conformité au regard des dernières normes et réglementations. La certification ISO 13485 doit être renouvelée tous les trois ans, ce qui contribue à la crédibilité du projet et à la pérennité de l’outil. Par ailleurs, de nombreux pays ont adopté la solution en 2025, au-delà des terrains MSF, ce qui démontre la scalabilité d’Antibiogo et sa capacité à s’adapter à différents contextes. L’outil va continuer d’évoluer pour répondre aux besoins spécifiques des équipes, que ce soit au Yémen, au Laos, au Kenya ou en Afghanistan. L’objectif est que l’outil dépasse le stade d’innovation et devienne un élément intégré dans les pratiques de diagnostic de routine.

  • LFMSF : Un dernier mot pour conclure ?

J. D. : La certification ISO 13485 est un jalon majeur pour le projet Antibiogo. Elle atteste que nous avons atteint un niveau d’exigence élevé dans le développement et la gestion du projet, comparable à celui attendu dans les pays les plus avancés comme la France. Antibiogo n’est pas seulement une innovation technique : c’est un outil concret pour freiner la RAM et garantir un accès équitable aux soins. Notre ambition reste simple : que chaque patient, où qu’il vive, bénéficie d’un diagnostic fiable et d’un traitement efficace.

 

Déploiement Antibiogo en septembre 2025

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